Compte rendu de l’Assemblée Internationale du 7 juin 2014 – Vue par Michèle Barbier

En attendant le compte rendu détaillé… et des dizaines d’autres photos !

  • 25 ans…
  • 48 pays représentés…
  • 300 personnalités…
  • Jean R.Th. Guion réélu Président International

Intervention d’ouverture
Toutes les interventions seront publiées intégralement dans un numéro spécial de la Lettre Francophone

L’Assemblée Internationale vue par Michèle Barbier

Ils sont très nombreux à partager le bonheur de se retrouver à la Maison de l’Amérique Latine, ce samedi 7 juin 2014, où le soleil des cœurs répond au soleil des cieux… 300 adhérents et délégués généraux de l’Alliance Francophon, venus de 51 pays, réunis dans le plaisir d’écouter des orateurs de talent qui les confortent dans leur engagement en faveur non seulement de la langue française, mais surtout des valeurs que, contre vents et marées, celle-ci propage de par le monde.

Certes, l’heure est à la fête, à l’amitié, entre le petit déjeuner savoureux et le déjeuner somptueux, suivi du partage du gâteau d’anniversaire, pour célébrer le vingt-cinquième anniversaire de l’Alliance, sur un fond poétique grâce aux contes africains dits avec tant de talent par la griotte Mariam Koné,

et aux chansons des lauréats de Kréatika, interprétés par le jeune Guillaume Muller et la délicieuse Lyse Bonneville…

Mais c’est aussi le temps de la réflexion.

« Faire de la communauté francophone une réalité »

Brillamment introduites par Charles Zorgbibe, les communications se succèdent.

Hommage est rendu aux pionniers de la francophonie : Pierre Gény évoque Léopold Senghor, rappelant que cette belle idée date du 18ème siècle.

Bernard Dorin souligne l’apport d’un Philippe Roussillon, d’un Xavier Deniau et de tant d’autres.

Pour sa part, Arnaud d’Hauterives, notre nouveau Président d’Honneur,

salue la mémoire de nos regrettés amis Pierre Mesmer, Maurice Druon et Stéphane Hessel, co-fondateurs de l’Alliance Francophone.

Le président Jean R. Guion, militant émérite, énonce une évidence : pour que la francophonie continue de rayonner, pour qu’elle soit perçue comme un rêve commun, au-delà des diversités culturelles, comme un idéal d’humanisme et de solidarité, il faut avant tout que les peuples aient le sentiment d’appartenir à une communauté spécifique.

L’éclat de la francophonie
Une communauté riche de 800 millions d’individus, répartis sur tous les continents, attachés à ce que la langue française représente : langue de la diplomatie, selon Pierre Chatel « le français, c’est la délicatesse, la précision, la subtilité ».

Outil de transmission des valeurs pour Louis Michel qui lance un avertissement : « l’expression unique conduit à la pensée unique ».

Langue de l’amour, selon Hassan Badoul « Nos poètes choisissent le français, langue de l’amour », qui rêve de « faire de notre monde un village humanitaire » et qui affirme l’ambition de son pays à être « le passeur entre l’Europe et l’Afrique Noire, l’Orient et l’Occident, l’Océan Pacifique et l’Océan Atlantique » avec, pour vecteur principal, l’usage du français.

Christophe Malavoy élargit le propos à la culture en général : « la culture est le contraire de la solitude et de la souffrance. C’est un échange, un partage, une action solidaire. Elle permet de faire prendre aux peuples conscience de leur identité, de voir dans les hommes quelque chose de plus sage et de plus grand qu’eux-mêmes »

L’importance de la diversité

« Nous avons une langue commune et des accents différents », affirme Pierre Chatel. « Les langues locales enrichissent le français », lui répond Yamina Benguigui.

« Dès le 18ème siècle, la langue française a apporté du rêve à tous les peuples : celui de la liberté, de l’égalité, de la fraternité », ajoute Lasana Kouyaté qui insiste sur l’obligation de consolider les bases de la communauté francophone, en rendant les institutions plus souples, mieux adaptées aux particularités des langues locales.

Ce concept s’applique particulièrement aux anciennes colonies. « Le Sénégal fait partie de la communauté francophone, déclare Mbougar Sarr.

Le français est la langue coloniale qui rappelle une partie douloureuse et sanglante de l’histoire du pays. ». Mais foin des ressentiments, du culte malsain de la souffrance… Tout comme l’auteur algérien Kateb Yacine présentait le français comme « un butin de guerre », le jeune écrivain considère son usage comme un enrichissement. Mais « ce n’est pas parce que j’écris en français que je ne suis pas sénégalais ».

Des nuages dans le ciel

Cependant, la francophonie est actuellement menacée. Tous en sont conscients : « Ou nous revenons à notre idéal ou nous mourons », prophétise Jean R. Guion. Le Traité de l’Atlantique ne perdrait rien de son élan constructif en dépassant les considérations commerciales et en respectant les cultures de ses interlocuteurs. « Diversité n’est pas hostilité. Evitons que les normes ne soient exclusives, s’alarme Jacques Godfrain »,

qui s’élève contre l’obligation de répondre en anglais dans les hautes sphères de décisions. Bernard Dorin abonde dans son sens : Il convient également de considérer avec prudence « les forces ethno-linguistiques » qui se multiplient, brandissant la langue locale comme un javelot pointé sur ce qui unit les peuples. « Les gouvernements doivent renforcer les identités étatiques ». Le développement échevelé du numérique, où l’anglais prédomine, rend le péril encore plus immédiat. Et pourquoi diantre ne pas permettre aux chercheurs et scientifiques francophones de rédiger leurs travaux dans leur propre langue ?

L’usage d’une langue est indissociable du rayonnement de la culture. Et la culture est avant tout la transmission des valeurs. « Les armes de la culture sont les armes de la paix », dit joliment Yamina Benguigui. « Si on se comprend, on ne se fait ni la guerre ni la charité, lui répond Pierre Chatel. Se mettre à la hauteur de l’autre, comprendre l’autre dans sa souveraineté. La culture est fondamentale ».

Les actions à mener

Il ne suffit pas de constater. Il est vain de se lamenter en pliant l’échine devant les mouvements de l’Histoire. Il faut réagir. La francophonie a un combat à mener, à mener avec audace et fierté. « Indignons-nous », proclamait Stéphane Hessel. Indignons-nous utilement.

Rejoignant l’analyse de Jean Guion, « Nous sommes à l’heure de l’effacement ou du renouveau du français », déclare Pouria Amirshahi,

en déplorant le renoncement de certaines élites démocratiques. « Il faut montrer un véritable volontarisme politique, cultiver le sens de l’appartenance à une culture » C’est ce que font les anglophones, les hispanophones, les arabophones… Pourquoi pas les francophones ?

Mais comment ? En libérant la circulation des personnes et des biens entre pays animés de la même identité culturelle, en leur accordant un visa francophone, projet âprement défendu par l’Alliance Francophone.

Bernard Dorin énumère les chances de la langue française : démographie explosive dans les pays d’Afrique concernés, qui doit s’accompagner d’une extension de l’éducation. C’est bien dans cet esprit que France 24, RFO… continuent inlassablement de diffuser la langue et la pensée françaises dans le monde, avec leurs 600 correspondants à l’étranger, s’adressant à 40 millions d’auditeurs, souligne Vicky Sommet qui représente notre fidèle amie Marie Christine Saragosse. Il en est de même de TV5-Monde, de l’Institut Français… Partout, le français résiste, sans se substituer pour autant aux langues locales.

Une langue qui n’évolue pas est une langue morte. Le français s’enrichit lui aussi des accents de l’ailleurs. C’est, annonce Pierre Geny, ce qu’ont constaté les membres de l’Académie des Sciences d’Outre-mer qui travaillent à un dictionnaire des mots de l’Outre-Mer.

Les débats prennent fin, le travail commence.

La Révolution Française a fait souffler sur le monde entier un idéal de liberté et de démocratie. Après la deuxième guerre mondiale, les Américains ont fait rêver les peuples d’un « american way of life » alléchant, comme le souligne Jacques Godfrain. Aujourd’hui, prises dans un tourbillon effréné où ne compte que l’immédiat, les sociétés ont tendance à favoriser l’économie, la thésaurisation des richesses matérielles, et par là-même, l’esprit de concurrence sauvage, de clivages intéressés, de ruptures, de pertes d’identité et d’abandon des valeurs essentielles de toute civilisation, basées sur le respect de chaque individu, dans son intégrité. La voix de La Fayette ne devrait-elle pas s’élever ?

Michèle André, Présidente de l’Union Parlementaire Internationale – Section Française déclare : « L’Union interparlementaire, dont je préside le groupe français, fête cette année ses 125 ans. Née de la volonté des parlementaires français et anglais, elle a deux langues officielles et nous y tenons : le français et l’anglais. A nous, francophones, de promouvoir la langue française et n’oublions pas que parler une langue étrangère nous permet de mieux comprendre notre propre langue. »
Arsène Bongnessan Yé, Ministre d’Etat du Burkina Faso clôturent la séance, soulignant son aspect chaleureux, instructif, volontariste et libérateur, et remerciant l’auditoire de la qualité de son écoute.
Le Ministre Burkinabè salue l’assemblée au nom du Président Blaise Compaoré Membre d’Honneur de l’Alliance Francophone depuis des années.

« La francophonie comme espoir d’élévation de l’individu », ainsi que la décrit Jean R. Guion, est parfaitement déterminée à conserver sa place et son message universel. Il appartient à chacun de se mettre à l’ouvrage pour que sa voix continue de se faire entendre, afin que perdure l’idéal qu’elle illustre avec ferveur.

Michèle Barbier